Le ralentissement de l’inflation et la dégradation des perspectives d’activité ont conduit la Banque centrale européenne à baisser d’un quart de point son taux d’intérêt directeur le 2 mai et à prolonger ses opérations de refinancement sur les marchés. En même temps, Mario Draghi a jugé essentielles la mise en œuvre des réformes structurelles par les gouvernements nationaux et l’instauration d’une union bancaire.
Ces craintes s’inscrivent dans le contexte d’une spirale négative qui tend à devenir auto-entretenue. La crise de 2008 avait été suivie d’un rebond assez sensible de l’activité à partir du printemps 2009. Le problème est que ce rebond s’est interrompu à l’été 2011 alors que la production industrielle restait inférieure de -9% à son point haut de début 2008. Non seulement la reprise a avorté, mais elle a laissé place à une rechute fin 2011 puis, après quelques mois de stabilisation, à un nouveau repli fin 2012. Le recul par rapport au début 2008 ressort désormais à -13%.
Source : Eurostat.
La faiblesse de la production traduit la vive contraction de la demande intérieure. Ainsi les ventes de détail stagnent à un niveau inférieur de ‑7% à celui d’il y a cinq ans, tandis que les immatriculations de voitures particulières continuent de reculer. Elles sont passées sous la barre des 8 millions en rythme annuel en regard d’une moyenne de 11,5 millions en 2006-2007.
Les exportations hors de la zone €uro ont été le seul véritable soutien de la croissance, sauf au cours des derniers mois où elles ont connu un passage à vide. Dans ces conditions, et face à la faiblesse du taux d’utilisation des capacités de production, l’investissement reste orienté à la baisse. Ceci est fâcheux alors que nombre d’économies ne sont pas suffisamment compétitives face à la nouvelle donne de l’économie mondiale.
Au cours des dernières semaines, la morosité ressortant des enquêtes auprès des entreprises et le gonflement rapide du chômage dans la plupart des économies européennes ont entraîné une inflexion du comportement des dirigeants européens. La remise en cause de l’intensité actuelle de la rigueur budgétaire est de plus en plus partagée. Le tournant le plus symbolique a été observé aux Pays-Bas, où le gouvernement a modéré son effort de redressement des finances publiques.
En Allemagne, alors que les indicateurs semblaient indiquer une reprise de l’activité après le trou d’air de la fin 2012, les données récentes font part d’un regain d’inquiétudes quant à la situation de l’économie. En effet, après s’être redressé en début d’année, le climat des affaires est nettement reparti à la baisse ces deux derniers mois. L’indice Ifo recule ainsi à 104,4 en avril (-2,3 points). Les commandes adressées à l’industrie ont cessé de diminuer, mais ne marquent aucune amélioration car elles sont pénalisées par la demande étrangère. L’évolution est comparable pour la production industrielle, qui s’est stabilisée après avoir chuté durant l’été 2012. Quant aux exportations, elles faiblissent mais demeurent supérieures à 90 milliards d’€uros par mois, malgré les difficultés des partenaires européens.
Source : Institut für Wirtschaftsforschung.
Pour le moment, la faiblesse de l’activité n’a pas eu de conséquences sur le marché du travail. En effet, l’emploi continue de progresser, ressortant à près de 41,8 millions de personnes, et le taux de chômage est au plus bas, à 5,3%. Le chômage partiel, bien qu’en hausse depuis le creux de l’été 2012, demeure contenu sous la barre des 100.000, ressortant à 88.810 en janvier. Au plus fort de la récession de 2009, il était monté jusqu’à 1.450.000.
En Espagne, le nombre de chômeurs de plus de deux ans dépasse désormais 2 millions de personnes contre 250.000 à l’été 2008, celui d’une durée inférieure marquant un palier. Ces derniers mois, les ventes de détail stoppent leur mouvement de repli à l’issue d’une chute de plus d’un quart en six ans. La réduction du déficit commercial est l’une des rares bonnes nouvelles: il ressort aujourd’hui à 1,5 milliard d’€uros par mois contre 4 milliards jusqu’au printemps 2011.